Nina Berman photographie dans le monde entier, en prêtant toutefois un intérêt particulier au paysage social et politique des Etats-Unis : “La plus grande partie de ma vie, je l’ai passée à parcourir les Etats-Unis, afin de comprendre ce qu’est l’American Way of Life”. Elle se consacre aux traces visibles engendrées par les idéologies dans le monde. Dans sa série Homeland, Berman rend compte de la militarisation du quotidien américain, après le 11 septembre 2001. Le titre de son travail fait référence au « Department of Homeland Security », créé par George W. Bush afin de protéger les Etats-Unis d’attaques terroristes. La photographe observe les agissements de ses compatriotes avec un regard acéré. Bien que le soleil brille la plupart du temps, le monde reste empreint d’une profonde tristesse.
Les sujets paraissent être prisonniers d’un monde de rêves, hermétique et surréel. La société des loisirs américaine se mêle aux exercices d’urgence. Les gens sur la plage portent leur regard haut dans le ciel sur la silhouette d’un bombardier de type B-2 Stealth – un trou dentelé dans le ciel, censé les protéger. En arrière-fond on peut lire “Paintball with Live Targets”. La peur fait partie du quotidien. Le niveau de menace du moment est communiqué par drapeaux de couleur, de façon à aider les habitants. Que dire du drapeau jaune sur lequel on peut lire “significant risk” ? La peur génère l’identité. Nina Berman nous montre à répétition des enfants et adolescents – dont les souvenirs les plus marquants consisteront en des jeux de guerre, dans une forêt inondée de soleil. La vie en état d’urgence sera pour eux la normalité, sans qu’elle soit questionnée (ni questionnable) : cette normalité s’appelle “Homeland”. (Simon Stähli)
Année de production : 2008
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