«C’est du trois tous les trois»
Dorothée Baumann

Dominées par un blanc clinique, des vues partielles des laboratoires sont finement structurées par les lignes que forment les instruments sophistiqués et leurs nombreux câblages. Une esthétique étudiée confère aux images un caractère distant, exacerbé par la quasi absence de figure humaine. Sur certaines photographies figurent des données d’enregistrement : les appareils, pris à leur propre piège, sont également objets d’analyse (comme l’est par extension l’image photographique). L’importance que revêt l’imagerie médicale tient en effet d’abord au fait qu’une image est un concentré d’informations bien plus efficaces qu’un texte ou qu’une explication verbale.

Dans cette atmosphère épurée, où la lisibilité est parfois mise à l’épreuve, les machines se sont imposées définitivement. Elles semblent faire interférences entre le médecin et le patient ou le cobaye. Seule représentation d’être vivant, un oeil ouvert sous un bonnet à électrodes est, à l’instar des autres machines, relié à d’innombrables fils. Dans ce processus scientifique, le corps, fragmenté, est réduit à une substance quantifiable. En lui substituant des appareils scientifiques, Baumann se demande ce qu’il est advenu « de sa dimension symbolique ». La photographe jette ici un regard ambigu sur ces lieux de recherches du corps humain, à la fois interrogateur sur leur développement futur et fasciné par leur efficacité et leur précision. Il en résulte des images qui documentent un thème actuel : celui du développement de la visualisation médicale et de sa problématique éthique

Catherine Kohler

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